Prenons conscience, pour nos revues de sciences…

Denis Diderot s’exprimait ainsi : « Je crois que nous avons plus d'idées que de mots ; combien de choses senties et qui ne sont pas nommées ! »1. Dans notre siècle, en revanche, où bons nombres ne font que copier n’aura-t-on bientôt plus que des mots à leur donner ?

Le monde universitaire est touché. C’est l’un de ses maux. Il ne faut pas le cacher.

Les revues scientifiques peuvent, par le fait même, l’être aussi. Il est temps de repousser jusqu’au diable ce démon à tout prix.

Comment faire ? Mettre en place des logiciels dans les rédactions comme l’évoque Michelle Bergadaà ? Chapeau bas pour l’idée qui nous semble avisée, mais aura-t-on la possibilité de lister un jour toutes les œuvres, anciennes et non répertoriées, toutes les revues « en ligne » dans les bibliothèques universitaires ? Les mailles du filet, ainsi tendu, seraient bien larges et n’attraperaient que les moins agiles des poissons.

Utiliser les méga bases de données anglo-américaines ? Nous savons déjà que certains veulent leur faire jouer le rôle irraisonnable d’arbitre dans les classements internationaux. Leur laissera-t-on décréter en plus de la possible vacuité de nos propos ? S’en serait trop. Nous laisserions aux chalutiers étrangers le fait de juger de l’innocuité de nos propres denrées.

Dans ce creuset naturel pour le bouillonnement des idées que sont les publications, un autre modèle doit surgir, au risque sinon qu’un avorton mal né ne montre finalement le bout de son nez !

Si « idée » tiens son étymologie latine de idea, « forme originelle », « original » ou encore « prototype », il est préférable dans notre cas de retenir son deuxième sens à dessein : « image », « idéal » repris dans son acceptation grecque.

Et voici le piège refermé.

Loin d’ici les filets, nous lui préférons la nasse qui piège les anguilles et les menaces.

Mettez en avant toutes les idées, montrez ces « images », faites les admettre.

Listons surtout ces articles qui nous agacent.

Si d’aucun a vent d’un forfait, qu’il le fasse simplement connaître.

Et au-delà des copinages complaisants de certaines rédactions avec leurs auteurs, encourageons les publications à faire connaître les trahisons et leur faire peur.

Labellisons cette démarche, créons une instance à mettre en place.

L’humain sera toujours plus perspicace que la machine qui le remplace.

Et voilà stoppée la menace, maîtrisée, sans quoi la réputation pourrait y perdre sa place.


Yves Soulabail
Secrétaire général de la rédaction de La Revue des Sciences de Gestion – direction et gestion

(1) DIDEROT Denis (1713-1784), Pensées de la peinture, Oeuv. t. XV, p. 170, extrait du Littré http://francois.gannaz.free.fr/Littre/xmlittre.php?requete=id%E9e.



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